PROCèS DE TRUMP : AU TOUR DE L’AVOCAT DE STORMY DANIELS DE TéMOIGNER

La première audience de la semaine au procès criminel de Donald Trump, à New York, a été marquée, mardi, par un feu roulant de témoignages, notamment celui de l'avocat de deux présumées maîtresses de l'ancien président américain.

Après que le juge Juan Merchan eut trouvé le candidat républicain coupable d'outrage au tribunal pour avoir violé l'ordonnance restreignant ce qu'il peut dire publiquement sur ce procès, les procureurs ont eu le temps de convoquer quatre témoins.

Si certains témoignages moins spectaculaires ont servi essentiellement au dépôt en preuve de documents, la comparution du quatrième et dernier témoin de la journée a remis les scandales sexuels au menu de l'audience.

Keith Davidson a négocié les ententes en vertu desquelles la playmate Karen McDougal, puis l'ex-actrice pornographique Stormy Daniels, qui affirment toutes deux avoir eu des relations sexuelles avec l'accusé, ont reçu de l'argent en échange de leur silence. La première a été payée par le groupe de presse American Media Inc. (AMI) et la deuxième, par l'ex-avocat personnel de Donald Trump, Michael Cohen.

M. Davidson a commencé par expliquer le déroulement des négociations concernant le paiement de 150 000 $ US à Karen McDougal, le premier des deux versements à avoir été fait.

J'ai une super grosse histoire sur Trump, a-t-il écrit le 7 juin 2016 dans un texto à Dylan Howard, qui était à l'époque rédacteur en chef du National Enquirer, un tabloïd qui appartenait au groupe AMI.

Nous en parlerons rapidement. Je vous donnerai plus que N'IMPORTE QUI pour ça. Vous savez pourquoi, a répondu M. Howard, selon l'échange de textos déposés en cour.

Dans des textos subséquents envoyés quelques jours plus tard, le rédacteur en chef du National Enquirer lui a demandé : A-t-il trompé Melania?, puis : Savez-vous si cette aventure est arrivée après son mariage avec Melania?

Les deux présumées maîtresses soutiennent avoir couché avec M. Trump peu après la naissance de son fils cadet, Barron.

Donald Trump a nié tout autant les allégations d'aventures extraconjugales que les chefs d'accusation de falsification de documents au centre du procès.

M. Davidson a indiqué avoir été également en contact avec le réseau ABC, ce dont il avait informé M. Howard au cours des négociations.

Sa cliente Karen McDougal préférait l'accord avec AMI, qui ne l'obligeait pas à révéler publiquement son histoire, a-t-il indiqué.

Ses priorités étaient de donner un nouveau souffle à sa carrière, de gagner de l'argent et d'éviter d'être étiquetée comme une maîtresse, a-t-il précisé.

Son rôle de négociateur a été lucratif : il a affirmé avoir reçu 45 % de l'argent payé à Karen McDougal.

La semaine dernière, le premier témoin appelé à la barre par les procureurs, l'ex-PDG du groupe de presse AMI, David Pecker, a expliqué comment, dès 2015, il avait mis son entreprise au service de la campagne de Donald Trump, un ami de longue date.

L'objectif, a-t-il révélé, était d'enterrer des informations dommageables sur le candidat républicain en payant les sources de ces histoires.

Les négociations entourant l'histoire de Stormy Daniels

Les procureurs ont ensuite amené Keith Davidson à parler des négociations subséquentes avec la deuxième cliente qu'il a représentée, Stephanie Clifford, dont le nom professionnel est Stormy Daniels.

Le National Enquirer avait initialement peu d'appétit pour son histoire : les allégations avaient déjà été publiées en 2011, sans avoir un réel retentissement, et elle les avait elle-même niées.

Mais l'intérêt pour le témoignage de Mme Clifford a atteint un crescendo après la diffusion, au début du mois d'octobre, d'un enregistrement désormais célèbre sur lequel on entendait Donald Trump se vanter de pouvoir « attraper » les femmes par leur sexe en toute impunité, a soutenu M. Davidson.

Rendu public un mois avant la présidentielle de novembre 2016, l'enregistrement semblait à l'époque menacer gravement les perspectives électorales de Donald Trump.

Trump est foutu, a écrit Keith Davidson à Dylan Howard. Ce dernier a répliqué : Agitez le drapeau blanc. C'est fini, estimant que les révélations sur Stormy Daniels avaient le potentiel d'être le dernier clou dans son cercueil.

Après avoir commencé des négociations avec AMI, M. Davidson a été mis en contact avec Michael Cohen en octobre 2016, a-t-il déclaré.

À ce stade, a expliqué en cour le PDG d'AMI la semaine dernière, l'entreprise ne voulait plus rémunérer d'autres sources disant détenir des histoires négatives sur Donald Trump. L'entreprise avait déjà payé un total de 180 000 $ US à deux sources, dont Mme McDougal, et échoué à être remboursée par Donald Trump ou par la Trump Organization.

M. Davidson a dit avoir ensuite négocié avec Michael Cohen. Ce dernier justifiait notamment les retards dans les discussions sur le paiement par le fait que [son] gars était sur le terrain pour faire campagne et qu'il ne pouvait pas prendre de décision en son absence.

Il a dit avoir par conséquent eu l'impression que Michael Cohen n'avait pas le pouvoir de dépenser de l'argent et avoir vu Donald Trump comme celui qui tirait les ficelles.

Je pensais qu'il essayait d'étouffer l'affaire jusqu'à après l'élection, a-t-il ajouté.

Cette affirmation va dans le sens de la thèse des procureurs, qui affirment depuis le début que la quête alléguée de Donald Trump pour faire disparaître des informations défavorables avait pour finalité sa victoire électorale. Des révélations faites après le scrutin de novembre n'auraient donc pas pu lui nuire.

La défense affirme au contraire que l'important pour Donald Trump était de défendre sa réputation, son entreprise et sa famille.

M. Davidson a par ailleurs spécifié que l'entente de confidentialité qui a éventuellement été conclue désignait Mme Clifford et M. Trump par des pseudonymes, soit Peggy Peterson et David Dennison.

Mme Clifford a ultimement reçu 130 000 $ US pour son silence.

M. Cohen a reconnu avoir payé 130 000 $ US à Stormy Daniels – il a purgé une peine de prison en rapport avec cet aveu – et a affirmé avoir agi sur les instructions de M. Trump.

Trois autres témoins

En matinée, Gary Farro, un ancien banquier au service de First Republic, une banque américaine ayant pour clients des particuliers fortunés, a continué le témoignage qu'il avait amorcé vendredi.

M. Farro a fait état des communications entourant les démarches de Michael Cohen pour ouvrir des comptes pour deux sociétés à responsabilité limitée (SARL). Ces sociétés-écrans avaient pour but de procéder aux paiements secrets liés au silence des deux présumées maîtresses.

Contre-interrogé par la défense, il a déclaré qu'il n’avait pas transigé directement avec Donald Trump et qu'il ne lui avait jamais parlé.

Après lui, les procureurs ont convoqué deux témoins, qui leur ont permis de déposer en preuve divers documents.

Ils ont ainsi interrogé un responsable des archives du réseau télévisé public C-SPAN, qui diffuse entre autres des événements politiques dans leur intégralité, ainsi qu'un employé d'une entreprise qui fournit la transcription des audiences lors de procédures civiles. L'entreprise a plus spécifiquement transcrit la déposition de Donald Trump dans une des deux poursuites civiles intentées par E. Jean Carroll.

Cette étape, qui aurait pu être évitée, a été nécessaire parce que les avocats de Donald Trump ont refusé de reconnaître l'authenticité de ces preuves.

La majeure partie de la semaine dernière a été consacrée au témoignage de David Pecker. Ce premier témoin des procureurs a expliqué en détail le stratagème visant à acheter et à supprimer de l’information négative visant Donald Trump afin de favoriser sa victoire en 2016.

Mardi, le juge a par ailleurs indiqué que Donald Trump serait en mesure d'assister à la remise de diplôme de son fils cadet le 17 mai, accédant à sa demande en raison du déroulement rapide du procès jusqu'ici.

Par ailleurs, Eric Trump, l'un des fils de l'ancien président, a assisté à l'audience. C'est la première fois depuis le début du procès qu'un des membres du clan Trump se présentait à la cour.

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