QUéBEC ASSURE QUE SA « LOI AIRBNB » DONNE DES RéSULTATS

Sept mois après l'entrée en vigueur, le 1er septembre dernier, de la nouvelle réglementation québécoise encadrant les locations d'hébergement de courte durée par le biais de plateformes numériques, le gouvernement Legault affirme, chiffres à l'appui, que ces dispositions ont déjà d'importantes répercussions sur le marché.

Le taux de conformité des annonces publiées de manière concomitante sur Airbnb avoisinait les 90 % en date du 2 février dernier, alors qu'il était de seulement 58 % en août 2023, a fait savoir le cabinet de la ministre du Tourisme, Caroline Proulx, jeudi.

En outre, le nombre d'offres sur ces deux plateformes aurait diminué à l'automne 2023 par rapport à 2022. Cette baisse serait de l'ordre d'environ 20 % dans la région de Montréal, selon les renseignements fournis au ministère du Tourisme par AirDNA, un fournisseur de données sur l'hébergement collaboratif.

À l'inverse, le nombre d'enregistrements délivrés par la Corporation de l'industrie touristique du Québec (CITQ) aurait crû de 67 % entre le 1er septembre 2023 et le 1er mars 2024, passant de 1911 à 3202 certificats.

Ces résultats – présentés par voie de communiqué jeudi matin, quelques heures avant l'étude des crédits budgétaires du ministère – ont été qualifiés d'encourageants par le cabinet de Mme Proulx.

Ils diffèrent néanmoins du constat dressé par le Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec (RCLALQ) qui, la semaine dernière, affirmait n'avoir vu aucun changement sur le terrain depuis l'entrée en vigueur du nouveau règlement.

Publiée vendredi, une enquête de La Presse révélait entre autres que des prête-noms étaient utilisés par certains propriétaires pour louer leurs logements en présentant frauduleusement ceux-ci comme leur résidence principale.

Il dénotait aussi que plusieurs résidences principales étaient déclarées par la même personne et que des locataires offraient leur logement sur Airbnb sans l'accord du propriétaire.

Faire échec aux locateurs délinquants

Interrogée sur le sujet à l'émission Tout un matin, jeudi, sur ICI Première, la ministre Proulx a assuré que son gouvernement continuerait d'agir pour déjouer le 10 % de petits coquins qui trouvent des moyens de contourner la loi et que d'autres projets de règlements pourraient être adoptés pour contrer leurs stratagèmes.

Elle s'est toutefois montrée réfractaire à une interdiction totale des locations à court terme, ce qui, selon elle, entraînerait la multiplication des annonces illégales.

Rappelez-vous l'histoire de la Tour des Canadiens de Montréal : il y a des gens qui avaient acheté des condos et il y avait de la location illégale, c'était le bordel total, et moi, ça ne me tente pas de retourner dans le far web de la location illégale, a fait valoir Mme Proulx.

Une loi qui manque de dents, selon QS

La nouvelle réglementation québécoise sur les locations d'hébergements de courte durée oblige notamment les plateformes numériques à forcer les locateurs à inscrire dans leur annonce le numéro du certificat d'enregistrement qu'ils doivent obtenir de la CITQ, qu'il s'agisse ou non de leur résidence principale.

Mais ces numéros d'enregistrement sont-ils les bons numéros?, a demandé en point de presse le porte-parole de Québec solidaire (QS) en matière de tourisme, Étienne Grandmont, jeudi matin.

Est-ce que ce sont de faux numéros? Est-ce que ce sont des numéros qui servent pour plusieurs résidences? Est-ce que c'est effectivement la résidence principale de la personne qui affiche sur cette plateforme-là?

Selon M. Grandmont, l'idéal serait que Revenu Québec puisse transmettre aux villes les données sur le lieu principal de résidence pour donner un coup de main aux inspecteurs municipaux qui, dit-il, ont de la misère à faire leur travail.

En attendant, la loi de la ministre Proulx n'a pas les dents qu'elle disait vouloir lui donner, juge-t-il.

Le registre public de la CITQ attendu pour l'automne

Lors de l'étude des crédits, plus tard dans la journée, la principale intéressée a expliqué à M. Grandmont que la question de la résidence principale était une notion fiscale relevant de Revenu Québec et que l'agence ne tenait pas de registre à cet effet.

Elle a toutefois précisé que l'interface de programme d'application (API) qui permettra aux plateformes numériques et au gouvernement de vérifier automatiquement la validité des numéros des certificats d'enregistrement de la CITQ devrait être prête pour le mois de juin.

Un registre public de tous ces numéros devrait ensuite être créé. Il sera lancé cet automne, a indiqué la ministre.

Des données difficiles à recueillir et à analyser

Mme Proulx s'est par ailleurs montrée dubitative par rapport aux conclusions de l'enquête de La Presse publiées la semaine dernière. Selon elle, il est faux de dire que le nombre d'annonces affichées sur les plateformes numériques d'hébergement à court terme a augmenté depuis l'année dernière.

Je questionne certaines sources de La Presse, a-t-elle dit, soulignant qu'Inside Airbnb n'était pas un mandataire du ministère du Tourisme et qu'il y avait des doublons et des erreurs dans ses données.

La méthodologie utilisée pour analyser les annonces publiées sur Airbnb à partir des renseignements fournis par AirDNA, cela dit, est elle aussi exploratoire et comporte un degré d’incertitude difficile à mesurer, reconnaît-on dans l'étude de conformité rendue publique par le gouvernement jeudi.

L'approche retenue, par exemple, n'a pas permis de vérifier la conformité des annonces sur les autres plateformes telles Vrbo, Booking.com, Hotels.com ou toute autre plateforme plus marginale, spécifient les auteurs de l'étude.

La migration de nombreuses offres vers la location à long terme (31 jours et plus) devrait aussi porter à réflexion, ajoutent-ils, estimant qu'il serait nécessaire que d'autres enquêtes soient menées pour comprendre si un marché souterrain de location à court terme est en train de se mettre en place pour contourner les règles.

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