POLéMIQUE AUTOUR DE L’œUVRE DE MEO : LA LETTRE OUVERTE DU COLLECTIF MKO

Sous forme de lettre ouverte, le collectif MKO (meuf ki osent) répond aux réfractaires de l'oeuvre de Méo et aux Institutions qu'ils représentent.

LETTRE OUVERTE

AUX PROFESSEURS et AU REPRESENTANT LEGAL DU LYCEE VINCENDO

AU RECTORAT DE LA REUNION

AU MINISTERE DE L’EDUCATION NATIONALE

AUX « FERVANTS DEFENSEURS DE LA REPUBLIQUE FRANCAISE », réfractaires à la libre expression

Chers représentants de l’Autorité institutionnelle, de l’Education Nationale,

Vous, qui représentez les valeurs de l’Education et de la République. Vous, qui avez la charge de l’instruction républicaine de nos enfants. Vous, qui œuvrez pour mener à bien les politiques publiques, sur notre territoire de la Réunion, en matière d’enseignement, de parentalité et de

cohésion sociale…Vous, qui devez, en vos grades et qualités, être un exemple pour la liberté, l’égalité et la fraternité…

Notre collectif Meufs Ki Osent, composée d’artiste féminines réunionnaises, métropolitaines, africaines et issues des Nations du monde entier, nous tenions à vous adresser cette lettre, à la suite de votre demande de censure, d’une partie de l’œuvre de l’artiste Méo, « Zoli Kèr », sous peine de sanctions.

En qualité d’artistes de la Cité, nous prenons le soin de vous répondre dans la bienséance, nous sommes éduquées dans la pure tradition de nos ancêtres et, instruites dans les valeurs de la République, faisant de nous des êtres sociaux à la fois fréquentables et indomptables.

Nous apprenions avec stupéfaction, cette affaire, grâce à un reportage diffusé sur nos chaines locales, la semaine dernière.

Voici les faits tels que nous les avons perçus : Méo, un artiste très engagé, créole et fier de ses racines est appelé pour réaliser une fresque sur le thème de l’identité profonde « celui qui oublie ses racines n’atteint jamais sa destination », à votre demande. Mais voilà, une fois l’œuvre finie et en dépit du respect du thème, par le choix judicieux de l’histoire de « Zoli Kèr », certains d’entre vous s’offusquent.

Vous vous êtes-vous réellement interrogé ? : Pourquoi l’artiste a barré l’intitulé

« Histoire de France » pour la remplacer par « Zistwar la Rényon » ? En effet, sans comprendre le processus de l’expérience artistique qui est d’éveiller les consciences, vous voulez qu’il modifie sa fresque, qu’il efface ces mentions et qu’il renie sa propre expression…Vous y allez fort : pressions, menaces institutionnelles et intimidations…

En somme, vous faites appel à un artiste que vous êtes censés connaitre, apprécier et respecter pour son œuvre. Vous vous positionnez en commanditaire. Et lorsque l’artiste ne répond pas à vos codes individuels, vous décidez de bafouer le principe d’éducation participative, dans le cadre de la réalisation d’une œuvre commanditée, au bénéfice d’un message, en direction de vos élèves. Vous préférez une œuvre esthétique et dénuée de son sens.

Cet artiste très connu, a un style bien à lui, et un franc parler qui reflète, avec finesse et cohérence, la vision de l’artiste, face aux contradictions d’une Nation française dans son rapport aux terres d’Outre-mer et Africaines. Une Nation qui prône la mixité, le vivre ensemble et le

métissage et, qui cependant bien souvent, manie ses concepts avec maladresse, « gros doigts » et faux-semblant…Nous ne sommes pas dupes et savons que dans ce système, et bien d’autres à travers le monde, c’est la course au pouvoir qui prime plutôt que l’intérêt général.

Il y a des dérives et des actes qu’il faut condamner, pointer du doigts et dénoncer ! Et ce, en tout temps, et, mêmes chers réfractaires, sous l’ère de la République, en 2024 …Vous devriez le savoir mieux que quiconque et vous devriez connaitre aussi la valeur du sens critique et les fondements de l’histoire de l’Art.

Nous, artistes, de la rue, saltimbanques et magiciens de la bombe, instruits aux grandes écoles d’art ou éclairés par un don vital, nous allons vous révéler le pouvoir de l’Art sublime :

Votre censure est le vecteur de vos points de vue partiels. Et, cette censure ne fait qu’accréditerles valeurs que vous attaquez. Car, vous mettez en lumière l’acte militant et engagé d’un artiste, en même temps que vous mettez en exergue vos croyances limitantes et votre incompétence à comprendre, expliquer et intégrer ce que vous avez-vous-même adoré, souhaité, commandé…Le style, la verve artistique et le talent de l’artiste. Vous avez choisi Méo.

Vous ne faites pas polémique par vos pensées malsaines, vous valorisez la position de l’artiste par votre acte de censure !

Alors en même temps que nous vous accusons de perdre le sens de votre profession et de votre posture, nous vous remercions d’avoir propulser « Zoli Kèr » sur une scène médiatique inespérée qui traversera le mur qui vous sépare de vos élèves. Puisqu’eux ils ont compris, puisqu’au-delà de la Ville de Saint-Joseph, des jeunes connaissent dorénavant « Zoli kèr ». Une histoire claire et sincère, qui sur cette mémorable fresque, laisse imaginer les pensées de cet enfant : « Mi lé créole, mi coze créole, mé mi koné pa rien de mon l’identité…I impoz à moin in l’histoire, un sèl ! Cèt la France, mi kompren pa…kisa mi lé ? ousa mi sorte ? ousa mi sava ?…Rakont à moin mon l’histoire, l’Histoire la Rényon ! »

« Celui qui oublie ses racines n’atteint jamais sa destination » …

L’image est sans doute violente pour vous ! Car elle reflète ce que vous peinez à voir ! Elle reflète sans doute les échecs de votre République !

Vous ne comprenez donc pas ! Cette violence qui se joue devant vous, chaque jour, face à certains jeunes qui ne réussissent pas dans vos canaux…Vous ne comprenez donc pas ! Ce sentiment, depuis l’enfance, que nous pouvons avoir d’être face à un miroir que l’on nous oblige

à regarder et dont le reflet ne nous ressemble pas ?

Et c’est une réalité sociale qui nous poursuit encore de générations en générations. Vous en êtes aussi la cause…par cette posture inappropriée que vous tenez…

Une réalité vécue par tant de jeunes qui parfois y trouvent un trou de faiblesses et bien heureusement, y rencontrent également leur lumière et leur force ! Nous en sommes la preuve !

Nous en sommes la cause !

Nous, les artistes de la Réunion, suivrons nos transmetteurs, les passeurs, les parabolèr, les Courageux…comme Alain Peters, Daniel Waro, Sudel Fuma, Ghislaine Bessière, Gilbert Pounia, Méo…Et tant d’autres…militants et fervents défenseurs de notre Kiltir. A chaque fois, que l’Institution posera des barrières, nous construirons des ponts.

Nous, les artistes du collectif MKO, nous plaçons au côté de Méo, au côté des élèves de Vincendo, au côté de la jeunesse réunionnaise éveillée et au côté de tous les artistes, qui seront ,fidèles à eux-mêmes, responsables et fiers, pour défendre sans cesse et sans répit, la liberté d’expression.

Vigilants ! Héritiers de notre Education Populaire, îliens, militants, Artistes, nous écrirons, peindrons, chanterons notre Histoire…sans effacement et polémique, nous défendrons nos œuvres d’art ! Partout où vous nous raillerez, nous vous repasserons.

LES REPRESENTANTES DU COLLECTIF MKO

2024-04-17T05:59:33Z dg43tfdfdgfd