UN EX-CHEF DE CABINET DE LA CAQ S’INQUIèTE DU « STATU QUO » AU GOUVERNEMENT

À l’instar du député Youri Chassin, qui a annoncé son départ de la CAQ la semaine passée, Philippe Gougeon, ex-directeur de cabinet du ministre des Finances Eric Girard, appelle les membres du gouvernement Legault à sortir du « statu quo » et à démontrer « qu’ils sont encore prêts à faire des changements ».

Dans une entrevue accordée dans le cadre du balado Question d’intérêt, Philippe Gougeon affirme que le gouvernement doit montrer qu'il a repris le contrôle après les deux premières années de son deuxième mandat, des années caractérisées par une chute dans les sondages.

Faut qu'ils continuent d’être en action, dit-il, parce que ce qui les guette, c'est un désir de changement qui pourrait s’exprimer dans la population lors des prochaines élections québécoises, prévues pour octobre 2026. S’ils ne sont pas capables de montrer qu’ils continuent à faire des changements, ça pourrait devenir impossible pour eux de revirer le bateau à quelques mois des élections. Je pense que c’est ça leur plus grand défi.

Philippe Gougeon a été directeur de cabinet du ministre Eric Girard de 2020 à 2022. Les deux années précédentes, il a été directeur adjoint au cabinet. Il a également été conseiller économique de la CAQ quand le parti était dans l’opposition. Il a quitté la politique à la fin du premier mandat du gouvernement Legault pour des raisons familiales, a-t-il expliqué dans le balado. L’entretien a été enregistré le 21 août.

Écoutez l'épisode 192 du balado Question d'intérêt – « Comment le ministre des Finances prépare-t-il son budget? » avec l'économiste Philippe Gougeon, ex-directeur de cabinet d'Eric Girard.

Un déficit difficile à avaler pour Eric Girard

Philippe Gougeon est également persuadé qu’Eric Girard a dévoilé un déficit budgétaire de 11 milliards de dollars en mars dernier à contrecœur. Il ne devait vraiment pas être content de déposer ça. Je suis assez convaincu que ce n’est pas un chiffre qu'il voulait montrer.

Les négociations avec le secteur public, qui ont mené à des hausses salariales substantielles, et la baisse du dividende d’Hydro-Québec ont cependant obligé le gouvernement à revoir sa réalité budgétaire.

Moi, quand j’ai vu ça, j’ai été surpris. Honnêtement, je ne m’attendais pas à ça, a dit Philippe Gougeon à propos du déficit record annoncé pour l’exercice 2024-2025.

Les prochaines élections seront d’ailleurs difficile pour la CAQ, selon l’ancien directeur de cabinet. Le gouvernement voudra montrer qu’il est en voie de revenir à l’équilibre budgétaire, tout en faisant des promesses, qui sont nécessairement coûteuses. Ça va être un équilibre difficile.

Au cours des dernières semaines d’ailleurs, le premier ministre François Legault et son ministre des Finances ont multiplié les messages sur le travail à faire pour revenir au déficit zéro. Les partis d’opposition affirment aujourd’hui que le gouvernement est entré en mode austérité.

La CAQ refuse toutefois catégoriquement de parler d'austérité et Philippe Gougeon est convaincu que c’est la bonne chose à faire. Les libéraux, ce qu'ils ont fait en 2015, c'est de couper drastiquement d'un coup. Puis ça prend des années rattraper ça. On peut retourner au début des années 2000, fin des années 1990, quand Lucien Bouchard a mis plein de gens à la retraite. Le rattrapage a pris des années. Quand tu coupes drastiquement, c'est trop long, récupérer.

Il ajoute : C’est pour ça que c'est une bonne chose que l'équilibre budgétaire ait été reporté dans le temps, parce qu’autrement, ça aurait forcé des choix et on aurait vu des coupes dans les services en santé, en éducation. C’est 50 % du budget et c'est juste là que tu peux couper ou presque.

Le gouvernement Legault a annoncé que l’équilibre budgétaire sera atteint au plus tard lors de l’exercice 2029-2030.

Absence de vision en matière de transport collectif

Toujours dans le cadre du balado Question d’intérêt, Philippe Gougeon s’est également permis de commenter les difficultés du gouvernement Legault en matière de transport collectif, alors que le gouvernement a du mal à articuler une vision claire sur ce sujet et à mettre en branle des projets pourtant nécessaires.

Oui, ils ont de la misère, reconnaît Philippe Gougeon. Le tramway, ç'a été tellement difficile à Québec [...]. Trop de monde avait sa voix, trop de monde était écouté, je parle ici des élus et du personnel. Trop de gens disaient : "Voici ce qu'on devrait faire".

Et tout le monde s’est braqué, dit-il, si bien que nous sommes encore aujourd’hui à la case départ.

La Caisse de dépôt et placement du Québec a déposé un rapport favorable à la réalisation d’un tramway. Le gouvernement Legault a formé un comité de transition afin d’en réaliser une première phase. Mais, CDPQ Infra a cru bon lancer un appel à l’action la semaine passée en commission parlementaire en demandant au gouvernement de mettre en œuvre rapidement ce projet.

Selon Philippe Gougeon, l’incurie du gouvernement sur le transport collectif part du fait que la vision initiale n'était pas claire. Qu'est-ce qu'on veut faire en transport en commun? Il y avait un plan en 2018, mais c'était des REM un peu partout. Puis rapidement, on s'est rendu compte que ce n'était pas viable. Donc, une fois tout ça passé, il restait quoi? Il ne restait pas tant de vision!

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