LES PREMIèRES NATIONS VERS PLUS D'AUTONOMIE POUR LE FINANCEMENT DE PROJETS

TORONTO — Les Premières Nations sont appelées à devenir de plus en plus des partenaires pour le financement de grands projets, un changement qui pourrait les conduire vers une indépendance financière, selon la présidente de la Coalition des projets majeurs des Premières Nations

S'exprimant lundi lors de la conférence annuelle de la coalition, la présidente Sharleen Gale, cheffe de la Première Nation de Fort Nelson, a mentionné que tout cela faisait partie d'une démarche visant à placer le consentement et la participation de la communauté à l'avant-plan du développement de projets.

«Il existe une nouvelle façon de faire des affaires sur nos territoires traditionnels, a soutenu Mme Gale. Nous connaissons notre valeur et nous savons à quel point il est important pour nous de participer de manière significative à nos économies.»

Les industries doivent comprendre que les accords de consentement et d’avantages ne suffisent plus, a-t-elle déclaré.

«C'est une nouvelle norme que l'industrie doit vraiment comprendre: l'équité est importante.»

Pour franchir le pas afin de devenir détenteurs de participations, il faudra de l'argent, et avec des taux d'intérêt élevés, Mme Gale a soutenu que des capitaux à des prix compétitifs sont cruciaux.

La coalition s'est formée il y a près de dix ans en partie parce que les Premières Nations se voyaient offrir des taux d'intérêt équivalents à ceux des cartes de crédit pour le financement de projets, ce qui rendait difficile le démarrage de quoi que ce soit, a relaté Mme Gale. 

Selon elle, la garantie de prêt autochtone de 5 milliards $ annoncée la semaine dernière dans le budget fédéral est une étape intéressante pour réduire le coût des capitaux, et les bénéfices découlant de cette mesure pourraient être utilisés pour financer encore plus de projets.

À mesure que le Programme de garantie de prêts pour les Autochtones sera déployé, «vous verrez qu'à terme, nous n'en aurons peut-être même plus besoin, car nous créerons notre propre source de revenus», estime Mme Gale. 

Un «effet d'entraînement»

Lors d'une conversation avec Mme Gale à l'occasion de la conférence, Dave McKay, président et chef de la direction de RBC, a dit que le pays en est aux premiers jours de la construction de ce cycle autonome.

«Commencer est difficile. (...) C'est la partie la plus difficile, mais ensuite vous allez obtenir un effet d'entraînement où vous allez réinvestir d'un projet à l'autre», a-t-il affirmé. 

M. McKay juge que l’engagement fédéral de 5 milliards $ est un bon début, mais qu’il est loin d’être suffisant. Il y a tellement de projets en cours, notamment liés à la transition énergétique, que cela va créer autant d’opportunités que de besoins de financement, a-t-il fait valoir.  

L'aide au financement sera également importante pour obtenir le consentement adéquat des Autochtones, a mentionné M. McKay.

«Il est très important que nous fassions les choses de la bonne manière dès le début, et que nous ne tombions pas dans les pièges du passé.»

Obtenir un consentement approprié n’est pas facile.

RBC a été critiquée pour son financement des pipelines Trans Mountain et Coastal GasLink, des projets qui ont suscité à la fois un soutien et une forte opposition parmi les Premières Nations.

La construction des deux projets est maintenant terminée et ils sont donc considérablement moins risqués, ce qui contribue à réduire le coût du capital pour la participation des Premières Nations.

D'après M. M. McKay, ce n'est qu'une question de temps avant que des accords de participation dans les pipelines soient annoncés, ainsi que des histoires de réussite à venir grâce à une meilleure coopération.

«Nous nous sommes limités en tant que pays parce que nous n'avons pas travaillé ensemble, et maintenant que nous travaillons ensemble, nous devrions adopter des idées plus grandes et plus audacieuses.»

Le changement dans les relations se produit en partie à cause de l'acceptation par le Canada de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, a souligné Perry Bellegarde, ancien chef national de l'Assemblée des Premières Nations.

«Nous utilisons cette clause de consentement libre, préalable et éclairé comme moyen et comme outil pour amener les gouvernements et l'industrie à nos tables», a-t-il déclaré lors de la conférence.

En plus de codifier dans la loi la norme élevée de consentement, M. Bellegarde a déclaré qu'il était également important que le Canada ait rejeté la doctrine de la découverte, selon laquelle toute terre non encore occupée par des chrétiens était considérée comme vacante et pouvait donc être revendiquée par les colonisateurs.

La reconnaissance du droit à l’autodétermination, du droit à leurs propres terres et à leurs propres lois, est cruciale pour naviguer entre croissance et durabilité, a-t-il soutenu.

«Ce droit est très important lorsqu'il s'agit d'examiner l'équilibre entre l'environnement et l'économie, en cherchant toujours à trouver l'équilibre, à trouver le juste milieu.»

Selon lui, il s'agissait d'un bon message à l'occasion du Jour de la Terre de se rappeler qu'en garantissant leurs droits, les peuples autochtones cherchent également à assumer leurs responsabilités envers les générations à venir et envers le monde naturel.

«En tant que bipèdes, nous avons la grande responsabilité de nous intégrer dans cette famille mondiale, si vous voulez, afin que nous puissions avoir un espoir pour l'avenir, que nos enfants et petits-enfants puissent avoir un espoir pour l'avenir.»

Entreprises dans cette dépêche: (TSX:RY)

Ian Bickis, La Presse Canadienne

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